Matthias Berahya-Lazarus

Le marketing digital : la voie de la croissance pour les points de vente

Le Président de Bonial France démontre combien la voie digitale est majeure pour la distribution « physique » et quels virages les points de vente doivent absolument prendre pour éviter de disparaitre à l’heure du Web triomphant.

Matthias Berahya-Lazarus
Matthias Berahya-Lazarus

Par Matthias Berahya-Lazarus, Président de Bonial France

L’arrivée en France de coaches Google pour les professionnels désirant développer leur visibilité en ligne est pour les commerçants un signal de plus : les points de croissance nécessaires pour combattre le marasme économique se trouvent sur Internet. Frappée de plein fouet par la crise, la grande distribution doit aussi faire face à l’essor des pure players. A l’heure où déjà un Français sur trois (1) fait de la recherche en ligne « son 1er réflexe de préparation d’achats », Morgan Stanley prévoit ainsi qu’Amazon pourrait représenter 26% du commerce mondial dans trois ans.

Comment les enseignes traditionnelles peuvent-elles faire face à la montée en puissance d’internet, média qu’elles n’ont jusqu’ici exploité que partiellement, pour capter et séduire ces consommateurs en ligne ? N’ont-elles pas tout à gagner à concurrencer ces nouveaux acteurs sur leur propre terrain, tout en jouant de leurs atouts historiques ?

L’offensive de l’e-commerce n’épargnera aucun secteur de la distribution

Force est de constater que le commerce en ligne n’épargne aucun secteur : ce n’est qu’une question de temps et de maturité. Après le tourisme, l’électronique ou le textile, c’est au tour d’autres secteurs, pourtant réputés difficiles à pénétrer, d’être concurrencés par des pure-players sur le web. Ces derniers n’hésitent pas à investir massivement en publicité, en ligne bien sûr mais également à la télévision, avec des objectifs de conquête agressifs.

Qui eût cru, par exemple, que le grand public achèterait un jour des voitures (Aramisauto.com) ou même des pièces détachées (Oscaro.com) sur internet ? De même, la bataille du meuble ne fait que commencer avec l’arrivée en France d’acteurs tels que Made.com, très présent dans les médias actuellement, ou de l’offre idoine d’Amazon. Il s’agit pourtant d’un secteur jugé délicat à pénétrer en raison du caractère impliquant des achats, de la nécessité prétendument incontournable de voir et toucher les produits et bien sûr de contraintes logistiques fortes.

Une autre concurrence inattendue provient enfin des industriels eux-mêmes, fournisseurs de la distribution. L’annonce par L’Oréal du lancement d’un site de vente en ligne est un exemple révélateur. Habituée à un usage intensif des média de masse, la marque s’émancipe de ses partenaires historiques de la distribution traditionnelle pour se lancer dans une stratégie d’investissement en ligne.

Le marketing et l’influence, au cœur de la bataille

En proportion, la part du e-commerce sur ces secteurs reste évidemment faible. Ces nouveaux acteurs du web, aussi solides et expérimentés soient-ils, ne vont pas emporter du jour au lendemain la moitié de leur marché. Néanmoins, leurs dépense en marketing, resposant essentiellement sur une parfaite maîtrise des leviers digitaux, montre un dynamisme saisissant (+14.8%) face à des dépenses marketing en quasi-stagnation côté Grande Distribution (+2.6%) (2). A l’heure du consommateur ultra-connecté, c’est une arme redoutable qui pourrait leur permettre de capter une part significative de la maigre croissance du marché en 2013 et 2014.

Les points de ventes physiques, historiquement maîtres dans l’art d’instaurer une pression promotionnelle via différents canaux traditionnels de communication, sont désormais largement concurrencés sur ce terrain par les pure players. Ces derniers génèrent leurs meilleures ventes grâce à des sollicitations permanentes et à la diffusion massive et ciblée d’offres promotionnelles agressives. La bataille de la croissance ne se joue donc plus seulement en circuit fermé entre distributeurs traditionnels, mais aussi et surtout en ligne.

Le digital, canal d’influence et de croissance pour les points de vente

Jusqu’ici, les enseignes traditionnelles ont surtout exploité internet pour les besoins de la vente en ligne, en concentrant autant que possible le trafic vers leur site de e-commerce. C’est un premier pas – et le plus logique – mais le digital, qui inclut à présent les mobiles et tablettes, peut également apporter beaucoup aux points de ventes physiques. Il peut notamment séduire et attirer ces nouveaux consommateurs connectés dans les magasins.

En quelques années, le temps passé sur le web a explosé, avec des internautes de toutes classes d’âge ou catégories socioprofessionnelles. Les temps de consommation média le montrent : les Français passent en moyenne 27,7 heures sur Internet, plus que la moyenne européenne (3).Chez les utilisateurs de smartphones (soit plus de la moitié des Français), ordinateurs, smartphones et tablettes captent aujourd’hui bien plus d’attention que la télévision et la radio… réunies ! A ce titre, ils ont donc atteint ensemble le statut de « média de masse » capable d’accueillir et de diffuser des campagnes d’influence de très grande ampleur, apte à développer les ventes d’un réseau ou restaurer une image-prix défaillante.

En outre, le digital rend le travail de ciblage bien plus facile qu’il ne l’a jamais été dans l’histoire des média. Nul besoin de découper le plan média en fonction des critères d’audience : le consommateur en phase de recherche ne cesse de livrer spontanément ses intentions au gré des moteurs de recherche ou au travers d’applications mobiles, souvent géolocalisées de surcroît. C’est la magie de l’« opt-in » et du mode « pull » digital, par opposition au mode « push » des médias traditionnels.

Ainsi, dans l’univers de la distribution, la question de l’affectation des budgets digitaux doit se poser à tous les décideurs. En effet, l’audience en ligne constitue aujourd’hui un fabuleux vivier à utiliser habilement. Non pas pour contrer frontalement des e-commerçants spécialisés toujours plus nombreux et aguerris, en considérant le digital uniquement comme un canal de vente, mais pour jouer à fond les atouts différenciants de son réseau physique. C’est toute la force des démarches « web-to-store », considérer le Web également et peut-être avant tout comme un canal d’influence.

 

(1)    Source IFOP-Bonial, Janv-2013.

(2)    Croissance des investissements publicitaires 2012 vs. 2011, Source Kantar

(3)    Source : Etude ComScore 2013

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