La démocratisation de la vidéoconférence passe-t-elle par la mort de la téléprésence?

Une tribune qui ne va pas plaire à tout le monde, et notamment à Cisco (voir dans cette édition). Pour Georges Millet, la téléprésence est morte… Diantre ! Explications de celui qui dirige la France, le BeNeLux et les pays nordiques pour la filiale collaboration vidéo pro de Logitech…

Georges Millet

Par Georges Millet, Directeur Régional France-Benelux-Nordics de LifeSize (division de Logitech)

La téléprésence a connu son heure de gloire. Elle a ouvert la voix aux technologies et à la collaboration vidéo, réduisant de manière efficace les déplacements professionnels et favorisant la communication entre bureaux distants. Pourtant, elle est aussi synonyme de coûts élevés, de complexité, et de systèmes vidéo rigides. En quelques années seulement, elle est devenue une solution destinée à une élite…

Pour autant, la téléprésence en tant que telle, à savoir un dispositif à trois écrans, une salle dédiée, une série de produits de vidéoconférence haut-de-gamme, a aussi favorisé l’essor d’un outil de communication. Elle a donné l’impulsion à la vidéo mais sa durée de vie est aujourd’hui arrivée à terme. Peut-on parler de mort de la téléprésence classique ? A-t-elle vocation à renaître sous une autre forme ?

Comment la téléprésence est-elle devenue une expérience obsolète ?

La réponse réside en deux facteurs, les plus importants au sein d’une entreprise, à savoir le temps et l’argent.

Selon Gartner, le coût total de l’installation d’un simple système de téléprésence (dans une seule pièce) peut varier entre 170 000 et 560 000 euros. Une somme à laquelle il faut ajouter les différents éléments de services (qui peuvent coûter en moyenne 10 000 euros par système, par mois,avec une bande passante dédiée), et vous obtenez ainsi un prix très élevé.

Les entreprises ne peuvent tout simplement pas justifier les coûts astronomiques qu’entraine l’installation des systèmes de téléprésence. Et en toute transparence, même si elles pouvaient assurer leur financement, pourquoi le feraient-elles ? Comment justifier une dépense d’un demi-million de dollars quand l’unique fonction est de connecter des équipes depuis différents endroits pour collaborer via vidéo comme si elles étaient présentes ?

Même si votre entreprise est capable de payer des factures de plus en plus élevées, il est important de prêter attention à deux autres sources d’investissements directement touchées par l’utilisation de la visioconférence :  votre équipement et le temps de travail de vos équipes informatiques. Entre la recherche et le choix du dispositif audio et vidéo, l’écran, ainsi que les divers composants pour la décoration et l’ameublement d’une salle (la mise en place des écrans, le câblage de la pièce, le montage des meubles), l’installation et la gestion d’un système de téléprésence classique peut occuper une personne en poste à temps complet. Qu’en est-il de vos bureaux à l’étranger ? Vous aurez besoin d’envoyer vos équipes informatiques à travers le monde pour effectuer toutes ces démarches de mise en place et de gestion dans tous les autres bureaux. Vous pourriez donc être amené à dépenser 20 000 euros pour rémunérer les intervenants informatiques et consacrer jusqu’à cinq semaines pour la mise en place de chaque système. A présent, multipliez cela par le nombre de sites nécessitant un système vidéo au sein de votre entreprise. La facture est lourde, n’est-ce pas ?

La vidéoconférence partout et pour tous, simple et abordable

Aujourd’hui la vidéo doit être accessible à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, et à tout employé, quel que soit son statut au sein de la société. Chacun doit être en mesure de profiter de l’amélioration de la collaboration et de la productivité grâce à la vidéo : de l’informaticien au responsable des ventes, en passant par le recruteur, l’ingénieur et le service financier.

Les organisations ont besoin de technologie leur permettant d’améliorer la productivité, de développer la communication visuelle, et d’accélérer la prise de décision à un prix raisonnable. L’utilisation de la technologie ne doit pas être une contrainte mais doit permettre l’amélioration de la façon dont on travaille. Etre capable d’entretenir une conversation vidéo avec n’importe quel fournisseur, client ou collègue (quel que soit le matériel que notre interlocuteur utilise) ne devrait plus être une simple option.Cette accessibilité devrait être intégrée à toutes les solutions de téléprésence classique, quel que soit l’utilisateur, l’endroit et l’équipement.

Les dernières innovations sur le marché illustrentcette démocratisation, notamment les nouvelles solutions dans le Cloud, lesplate-formes virtualisées, et les différents services disponibles sur chaque smartphone et tablette. Ensemble, elles contribuent à toucher un panel plus large encore d’utilisateurs.

Un marché ouvert à des solutions alternatives

Selon les cabinets d’analystes, la communication vidéo immersive reste une solution de niche en raison de son prix exorbitant, à la fois en termes d’achat et d’utilisation. En 2011, la croissance des revenus générés par l’utilisation massive des systèmes de téléprésence multi-codec s’est avérée beaucoup moins élevée que la croissance des revenus enregistrée avec en salle mono-codec. De plus, Wainhouse Research a constaté une baisse annuelle de 16,3% de la croissance mondiale dans le secteur de la téléprésence.

A contrario, l’utilisation de systèmes vidéo traditionnels dans des salles dédiées est en hausse. Ce phénomène s’explique par la baisse du prix des systèmes, des connexions Internet moins chères et la simplicité d’utilisation.

En positionnant la téléprésence comme un outil de collaboration haut-de-gamme, un modèle inaccessible manquant d’intéropérabilité, les consommateurs ont été confrontés à un environnement virtuel et inabordable. Alors que la téléprésence révolutionnait la façon dont nous collaborions, son manque évident de flexibilité a mené tout droit à sa perte. La téléprésence est morte, qu’elle repose en paix.