Majoritaires en nombre, des milliers de petites structures façonnent le paysage de la distribution IT en France. Constituées de seulement quelques collaborateurs, elles évoluent le plus souvent en dehors des radars du marché, mais jouent un rôle clé dans l’équipement des entreprises et établissements publics en France.
C’est le cas de QPM, cofondée en 2016 par Matthieu Druon, alors âgé de 22 ans. Lancée autour de la vente de cartouches pour les professionnels, l’entreprise s’est progressivement recentrée sur l’IT. Une évolution qui lui a permis de dépasser les 2 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2024.
Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans l’entrepreneuriat ?
Matthieu Druon : Nous nous lançons dans l’entrepreneuriat 2016, avec mon frère Quentin. À cette période, Quentin a déjà un premier parcours dans la bureautique, notamment chez Office Depot et chez un fabricant de cartouches reconditionnées. C’est lui qui perçoit le premier le potentiel, un besoin sur le marché des consommables pour les professionnels, en particulier sur l’offre remanufacturée. Il me propose de créer avec lui une entreprise : « Qualité Print » qui deviendra plus tard QPM.
A cette époque, j’ai 22 ans, et une première expérience dans le recrutement, en tant que commercial chez Crit Intérim. C’est peu, mais cela va beaucoup compter pour moi : vendre de l’intérim, c’est très exigeant : j’apprends à passer plus de 100 appels par jour. Et je suis déjà ambitieux : je ne connais pas le secteur, mais je suis prêt à travailler et à mettre toute mon énergie sur ce projet. Nous nous lançons, sans moyens, non pas dans un garage de la Silicon Valley, mais dans le salon de mes parents, dans le Val d’Oise !
Peu d’entrepreneurs se lancent aussi jeunes. Comment se passent vos premiers pas ?
Avec du recul, je pense que c’est au contraire mon âge qui m’a permis d’avancer vite. J’étais encore chez mes parents, je n’avais ni charges, ni crédit. Je me suis dit que c’était le moment ou jamais pour me lancer, sans pression financière. Je voulais vivre une première aventure forte, aller au bout d’un projet. Je ne me suis pas posé la question de chercher un CDI en parallèle, je voulais m’investir à 100 %. J’ai toujours eu en tête l’envie de bâtir quelque chose. Pour moi, créer une entreprise, c’était un peu comme lancer un personnage dans un jeu vidéo : il faut le faire monter de niveau, surmonter les obstacles, les imprévus, le faire évoluer sans cesse. Je savais que je pouvais échouer, mais j’avais surtout envie de tout faire pour réussir.
À quel moment vous rendez-vous compte du potentiel de l’entreprise ?
Les premiers mois, je vends des produits que je connais peu. Mais je me lance comme j’ai appris à le faire : j’appelle, sans cesse, j’écoute et j’intègre les besoins de mes interlocuteurs. Jusqu’à 200 appels par jour, en suivant les heures d’ouverture des entreprises par secteur. Rapidement, je réalise que j’obtiens des devis beaucoup plus facilement que dans l’intérim.
Au bout de trois mois, une commande à elle seule me permet d’atteindre l’objectif mensuel que je m’étais fixé : 1 500 euros de marge. C’est à ce moment-là que je me dis que ça peut vraiment fonctionner. Vendre du produit, c’est concret, mesurable. Et surtout, on peut ajuster nos marges nous-mêmes, contrairement à ce que j’avais connu en tant que salarié.
Dans les années qui suivent, comment faites-vous évoluer votre activité ?
Pendant trois ans, nous restons concentrés sur les consommables. Mais au fur et à mesure, nous commençons à traiter avec des entreprises un peu plus structurées. Ce ne sont plus seulement les assistants ou standardistes qui passent les commandes, mais les services informatiques. Ils commencent à nous demander des périphériques, des PC, des smartphones, des switchs…
En 2020, avec le Covid, tout s’accélère. Les entreprises doivent équiper en urgence leurs collaborateurs en télétravail. Nous élargissons rapidement notre catalogue. L’année suivante, en 2021, nous passons un cap très symbolique, celui du million d’euros de chiffre d’affaires. C’est à ce moment-là que nous décidons de renommer Qualité Print en QPM.
Pourquoi avoir abandonné le nom “Qualité Print” ?
Le nom allait devenir un frein. Lorsque nous discutions de leurs projets IT avec nos clients, de plus en plus nous disaient : “Je ne savais pas que vous faisiez autre chose que de la cartouche” : c’était frustrant pour nous. Idem côté recrutement, les commerciaux IT que nous avions en entretien comprenaient mal notre positionnement, lors de nos premiers échanges.
Le changement était tout simplement devenu nécessaire pour aligner notre image avec la réalité de notre offre. C’était aussi un signal envoyé au marché : nous ne sommes plus un vendeur de cartouches, nous sommes un revendeur matériel et solutions IT, à part entière. Ce changement s’est matérialisé début 2023. Il n’y a pas eu un avant et un après, mais ce changement a clairement entretenu notre dynamique de croissance.
Que retenez-vous de cette époque de forte croissance ?
Jusqu’en 2021, je ne faisais que du commerce. Puis nous avons recruté une première commerciale. C’est à ce moment-là que j’ai compris qu’être manager, être dirigeant, c’est un autre métier. Au début, j’ai eu du mal à comprendre que nos collaborateurs ne s’investissent pas autant que moi. J’ai vite compris que c’était normal, et même sain. J’avais aussi le sentiment de ne pas toujours être légitime, étant donné mon âge.
Cela a renforcé ma volonté d’être exemplaire : arriver avant tout le monde, partir après, faire les meilleurs chiffres. J’ai toujours pensé que la légitimité ne se décrète pas, elle se gagne. Donc j’ai continué à énormément me former, aux technologies que nous demandaient nos clients, aux nouvelles solutions des constructeurs et éditeurs. C’était une période très dense pour QPM, pour moi… Mais surtout je pense très stimulante pour chacun d’entre nous !
Où en est QPM aujourd’hui ?
Nous avons terminé l’année 2024 avec un chiffre d’affaires de plus de 2 millions d’euros, et plus de 500 clients actifs, essentiellement des PME et des établissements publics. Ce qui change également, c’est que nous accompagnons désormais des ETI. Des clients forcément plus exigeants, qui nous amènent à élargir encore nos offres, nos prestations, et nos compétences. Nous sommes actuellement quatre dans l’équipe, avec deux recrutements en cours, l’objectif est d’être six le plus rapidement possible.
Aujourd’hui, nous avons structuré une offre solide autour du matériel IT, du print et du reconditionné. Nous travaillons de manière de plus en plus étroite avec des constructeurs comme Lenovo, HP, Samsung, Brother. Sur le reconditionné, avec des partenaires comme FlexIT, Itancia, et Armor Print, qui est devenu Altkin en 2024, pour le print. Nous travaillons désormais sur notre montée en puissance sur la Cyber et les services IT.
Que transmettez-vous aux collaborateurs qui rejoignent l’entreprise ?
Je dis souvent que le meilleur commercial, c’est celui qui sait écouter. Aujourd’hui, parler sans écouter ne sert à rien, surtout dans un marché saturé d’informations. Il faut poser les bonnes questions, cerner les besoins réels. Notre valeur ajoutée, c’est le conseil, pas le produit. Si c’est juste pour vendre une référence, le client peut aller sur Amazon.
L’autre facteur essentiel à mes yeux, c’est la curiosité, l’envie d’apprendre. Nous sommes en train d’accélérer sur les formations et les certifications éditeurs et constructeurs. Pas à pas, l’équipe monte en compétence, et j’essaye de faire en sorte que cela devienne naturel pour tous. L’équipe passe actuellement les certifications Lenovo. De mon côté, je viens de passer la certification Mailinblack, pour m’assurer qu’elle correspondait à nos attentes en matière de solutions cyber, qu’elle serait un vrai différenciateur pour l’équipe. Je suis très attaché à tester moi-même les modules de certification avant de les transmettre à mes collaborateurs. Et il reste encore beaucoup à faire pour couvrir l’ensemble des solutions IT du marché.
Justement, quelles sont vos ambitions pour QPM cette année ?
Nous allons continuer à renforcer notre position sur le matériel IT, qui reste notre socle. Nous avons un modèle rentable sur le matériel et le reconditionné. Maintenant que l’équipe s’étoffe, je peux sortir du 100 % opérationnel et prendre du recul sur l’évolution de l’entreprise. Mon rôle évolue, j’essaye de me libérer du temps pour structurer, anticiper, faire grandir l’organisation. Ce n’est pas simple bien sûr, mais j’ai la chance de pouvoir m’appuyer sur une équipe en qui j’ai toute confiance.
Nous sommes en train de lancer notre plateforme e-commerce, qui va permettre à nos clients de passer commande en autonomie et à nos équipes de gagner en efficacité. Nous avons travaillé dessus depuis plus d’un an, c’est une nouvelle étape très importante qui s’annonce pour QPM, qui va nous permettre d’accélérer sur nos autres chantiers, à commencer par notre montée en puissance sur des solutions et services IT complémentaires à nos offres actuelles.
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