Perspectives cauchemardesques pour l’économie française, selon Euler Hermes SFAC

Pessimiste. C’est le moins que l’on puisse dire de la dernière étude en date de l’assureur-crédit Euler Hermes SFAC sur l’état de l’économie française. Une étude en phase avec les récents propos de notre premier ministre, François Fillon, mais pas du tout (ou si peu) avec ceux de Christine Lagarde, même si celle-ci a du convenir qu’on était bien entré en récession…

Pour Euler Hermes SFAC, l’économie mondiale traverse un moment dangereux avec, pour la première fois depuis 1945, la production mondiale qui va reculer en 2009 et la probabilité d’une entrée de l’OCDE en déflation fin 2010 qui augmente à vitesse grand V. Dans ce contexte, l’économie française devrait reculer de -1,8 % en 2009 puis connaître une reprise lente, particulièrement faible et fragile, de 0,5 % en 2010.

Pourtant l’assureur-crédit pointe de nouvelles alertes qui portent sur les destructions d’emploi, la dérive des finances publiques et la dégradation financière des entreprises. Ces phénomènes conjugués accentuent terriblement le risque d’une récession durable. Et le rapport d’évoquer la probabilité que les défaillances d’entreprises puissent atteindre le record historique de 72 000 en 2009, voire plus en 2010 !

« Nous affrontons la première récession de la mondialisation. C’est pour cela que les pays émergents sont fortement touchés par la crise, à la fois acteurs et victimes », explique Karine Berger, directrice des études d’Euler Hermes SFAC. Dans l’OCDE, la crise frappera plus fortement les pays les plus dépendants aux exportations (Allemagne et Japon), et plus longtemps ceux dans lesquels les bulles immobilières et financières se sont le plus développées (Royaume-Uni, Espagne). « Les déficits publics des pays de l’OCDE représenteront plus de 2300 milliards de dollars en 2010, ce qui accentue le risque obligataire mondial », commente Maxime Lemerle, responsable des études économiques d’Euler Hermes SFAC.

Une reprise ? Oui, mais lente et pas avant 2010

En France, la reprise serait selon l’étude lente et très fragile, pas supérieure à 0,5% en 2010. Pour l’assureur-crédit de nombreuses alertes rouges se sont déclenchées en France, et avec un recul de -1,8 % du PIB l’année 2009 sera aussi mauvaise sur le front domestique que sur le front extérieur.

L’investissement des entreprises et celui des ménages  continueront de se contracter jusqu’en 2010, et les revenus réels des ménages ralentiront pendant deux ans du fait des destructions massives d’emploi. Le taux de chômage augmentera jusqu’à 10 %, interdisant une reprise solide de la consommation. En dépit des mesures de relance, la crise interne deviendrait auto-entretenue et l’économie française sortirait difficilement de récession en 2010, avec seulement 0,5 % de croissance anticipée, exclusivement sous l’hypothèse d’une reprise des stocks. Dans ce contexte, la situation des finances publiques serait très fortement dégradée, avec une dette de 75 % du PIB et une augmentation autonome des intérêts de la dette au-delà de 3 % du PIB.

« La situation financière à court terme des entreprises est la plus dégradée depuis 25 ans. Par ailleurs, les baisses importantes des carnets de commande des entreprises – en chute de 20 à 30 % actuellement – amèneront une décroissance du niveau du crédit interentreprises que nous chiffrons à -10 % minimum pour 2009 », souligne Michel Mollard, président du directoire d’Euler Hermes SFAC.

Tous les secteurs, à l’exception des secteurs non marchands, enregistreront une croissance négative en 2009. Du reste, dans ses dernières statistiques Euler Hermes Sfac a indiqué que dès le premier mois de l’année la situation dans le domaine du commerce IT a été très dure : le nombre de défaillances dans le secteur du commerce de détail de produits informatiques a été multiplié par 2,5 au cours du mois de janvier par rapport à janvier 2008. De quoi anticiper une croissance spectaculaire des défaillances sur l’année 2009 : tablant au départ sur 4% de hausses des défaillances pour l’ensemble du secteur IT (négoce et services), il indique que ce taux pourrait atteindre jusqu’à 7% !

Le scénario de la déflation généralisée fin 2010 n’est plus écarté

La probabilité d’un « scénario alternatif » d’une entrée en déflation fin 2010 augmente actuellement, explique l’assureur-crédit. Les incertitudes sur l’amplitude des créances douteuses dans le système financier amènent à envisager l’hypothèse d’une déflation. Ce « scénario alternatif », avec une chute lente des prix et des salaires, signifierait une baisse de -3,5 % du PIB de l’OCDE en 2009 et de -0,7 % en 2010. Pour la France, ce scénario se développerait du fait des alertes sur plusieurs composantes de la demande intérieure : un repli de -1,1 % du PIB l’an prochain, et une montée du taux de chômage à presque 12 %, signifierait une entrée progressive en déflation.

Toujours aussi effrayantes les perspectives d’Euler Hermes SFAC incluent l’explosion des défaillances d’entreprises en France en 2009, ce dans tous les secteurs et toutes les régions, notamment les plus dépendantes aux industries manufacturées. Après une augmentation de 15 % en 2008, les défaillances d’entreprises en France bondiraient de 25 % en 2009, pour atteindre un chiffre record de 72 000. Et tous les secteurs risquent fort d’enregistrer des défaillances en forte hausse. Un doublement des « grosses défaillances » (plus de 15 millions d’euros de chiffre d’affaires) est là encore prévisible.

« Dans ce contexte de recrudescence des défaillances, nous constatons une réelle prise de conscience du risque d’impayés et des inquiétudes naturelles des entreprises quant au pilotage possible de ce risque d’où une forte demande en assurance-crédit. Nous avons ainsi enregistré + 25 % de production nouvelle pour la France en 2008. Face à cela, nos actions sur le ciblage et la sélection des risques font partie intégrante de notre politique de souscription et de gestion des risques », conclut Michel Mollard.

Faites-vous votre idée à partir des résultats impressionnants de cette étude, car même si l’on nous incite en haut lieu à rester optimistes, de tels chiffres ont de quoi refroidir, à moins qu’un assureur-crédit ait fatalement la tentation de noircir le tableau…