Taxe professionnelle : Le coup de gueule d’un dirigeant de PME

Par Vighen Papazian, PDG d’Infodis

La loi relative à ce que l’on définit, à tort, comme la  » suppression  » de la taxe professionnelle, a été adoptée par l’Assemblée nationale le 23 octobre 2009 dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances 2010.

Loin d’être supprimée, l’ancienne taxe professionnelle sera en fait modifiée et remplacée par la Contribution Economique Territoriale (CET) qui se décompose en deux parties : une cotisation locale d’activité basée sur les valeurs foncières des entreprises et une cotisation complémentaire, taxant la valeur ajoutée. Le taux de la cotisation complémentaire suivra un barème progressif. Il ira de 0% pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 500 000 € à 1,5% pour celles dont le C.A. dépasse 50 millions d’Euros.

S’il est vrai que 80% des entreprises seront gagnantes, notamment les entreprises industrielles et les PMI, cette CVA (Cotisation sur la Valeur Ajoutée ou CC pour cotisation complémentaire) est surtout un nouvel impôt très pénalisant pour des dizaines de milliers de PME comme la nôtre, créatrices d’emplois qualifiés, et exposées à une forte concurrence internationale.

Les modalités d’application de cette réforme ne manquent pas d’inquiéter dans notre secteur d’entreprises de services innovantes : nos SSII fournissent en effet des services, des produits et des solutions à haute valeur ajoutée et permettent à leurs clients français de répercuter à leur tour des offres compétitives sur le plan international.

Selon les projections du Syntec (Fédération des groupes et sociétés françaises spécialisés dans les professions de l’Ingénierie et des Services Informatiques), une PME innovante en conseil et services aux entreprises, qui emploierait près de 100 personnes (dont 80% de cadres) pour un chiffre d’affaires de 7 millions d’Euros, avec une marge de 3% et une valeur ajoutée représentant 80% du C.A., devrait s’acquitter d’une taxe sur la valeur ajoutée d’environ 50 000 € au lieu des 4 000 € de taxe professionnelle (part foncière) qu’elle acquittait jusqu’à présent…

N’est-on pas là dans le domaine de l’irrationnel le plus fou ? Cette aberration pourrait se révéler fatale pour le secteur qui génère pourtant le plus de croissance. La nouvelle taxe va accélérer le processus de délocalisation dans notre secteur où l’offshore grignote déjà des parts de marché tous les jours.

Les entreprises installées à l’étranger (à Bangalore en Inde par exemple) seront incontestablement favorisées : elles ne payeront pas cette nouvelle taxe sur la valeur ajoutée. Bercy vient donc de leur faire un cadeau royal : elles pourront déléguer en France du personnel qualifié (techniciens et ingénieurs) sans être soumises aux mêmes taxations que les entreprises françaises.

La suppression de la taxe professionnelle, annoncée par le gouvernement, était destinée à renforcer la compétitivité des entreprises françaises. Réformer la Taxe Professionnelle était en effet indispensable : en taxant les investissements, cette dernière avait contribué à accélérer la délocalisation du tissu industriel français.

Mais, en l’occurrence, le remède imaginé par les énarques de Bercy va tout simplement tuer le malade.